Ces derniers mois, nous avons constaté une volatilité accrue des prix du Dynamic Containment (DC). Pendant longtemps, le DC offrait un tarif stable et attractif de 17 £/MW/h à tous les participants. Rien que ces deux derniers mois, les prix d’équilibre ont atteint des sommets à 104 £/MW/h, et des creux à seulement 0,50 £/MW/h. (Voir figure 1 ci-dessous.) Que se passe-t-il donc ?

En résumé, une grande partie de cette volatilité provient de la conception des enchères. National Grid ESO cherche en permanence à optimiser ses services, et cela passe par des ajustements dans ses enchères. En novembre, l’ESO a diminué ses exigences de volume. Puis, en mars, l’ESO a supprimé les contraintes d’ordre de mérite. Plus récemment, des modifications de la courbe de demande ont rendu la dépense totale bien plus variable – et fortement dépendante du volume acheté.
Alerte spoiler
Tous ces changements ont complexifié la façon d’enchérir dans les ventes Dynamic Containment. Résultat : différents optimiseurs adoptent des stratégies variées pour être acceptés dans le DC (et, bien sûr, pour maximiser leurs gains).
Comme l’enchère DC se fait au prix d’équilibre — c’est-à-dire que tous les gagnants reçoivent le même prix — certains acteurs du marché sont responsables de la hausse des prix plus souvent que d’autres, ce qui profite ensuite à tous les autres. Bref, certains participants ont bien plus d’influence que d’autres sur les revenus générés dans le DC.
Dans cet article, nous analysons les comportements d’enchères dans le service DC basse fréquence. Plus précisément, nous abordons :
- Ce que sont les offres « crosse de hockey » et comment elles sont utilisées dans les enchères Dynamic Containment.
- Qui fixe réellement les revenus pour le reste du marché.
- Et l’appétit pour le risque des différents acteurs.
Tendances des stratégies d’enchères Dynamic Containment
Avec la nouvelle courbe de demande élastique de l’ESO, exploiter l’enchère — pour minimiser le rejet et maximiser les revenus — est devenu bien plus complexe. La courbe de demande du Dynamic Containment évolue chaque jour, rendant la prévision du prix d’équilibre plus difficile.
Offres « crosse de hockey »
Une stratégie courante consiste à utiliser les offres dites « crosse de hockey ». Cela signifie qu’un acteur propose une grande partie de sa capacité à un prix bas — ce qui augmente ses chances d’acceptation — puis une petite partie à un prix élevé (pour tirer le prix d’équilibre vers le haut). On entre alors différents types d’offres (identifiés par leur « code bloc »), ce qui crée des blocs « parent » et « enfant ». Voici à quoi cela ressemble :
- Bloc parent (offre C01*) : généralement, un participant propose la majorité de la capacité de son actif à un prix bas, augmentant ainsi la probabilité d’acceptation.
- Bloc enfant (offre C02) : lorsqu’une offre C02 est liée à une offre C01 plus petite, le bloc enfant doit être accepté si le parent l’est. Ce bloc C02 peut donc servir à augmenter le prix d’équilibre. Cependant, comme C02 doit être accepté avec C01, cette stratégie comporte le risque qu’aucune des deux offres ne soit retenue.
* Les offres C01 peuvent aussi être indépendantes, sans nécessairement être liées à des offres C02.
La figure 2 (ci-dessous) illustre une offre « crosse de hockey ». Comme on le voit, l’offre C01 (bloc parent) à grand volume/prix bas forme le manche de la crosse, tandis que l’offre C02 (bloc enfant) à petit volume/prix élevé forme la lame.

À quoi cela ressemble-t-il concrètement ?
La figure 3 (ci-dessous) montre cette stratégie à l’œuvre. Il s’agit ici de l’enchère DC basse fréquence (DCL) du 13 mars 2022, bloc EFA 5. Nous avons mis en évidence les offres C01 et C02 d’EDF. La première est une offre de 45 MW à 0,25 £/MW/h. La seconde est une offre de 1 MW à 95 £/MW/h.

- Lors de cette enchère, l’ESO a acheté 876 MW.
- Les 813 premiers MW étaient proposés à moins de 6 £/MW/h.
- Comme indiqué figure 2, EDF a choisi la stratégie « crosse de hockey ».
- Résultat : l’enchère s’est conclue à 95 £/MW/h. Chaque participant a donc reçu ce montant, même ceux qui avaient proposé des prix bien plus bas.
EDF n’était pas le seul acteur à tenter cette stratégie. La figure 4 (ci-dessous) montre la même période d’enchère, cette fois ventilée entre offres C01 et C02.

De même, si l’on observe toutes les offres acceptées depuis les changements de la courbe de demande, on voit comment les acteurs se positionnent sur les enchères Dynamic Containment. La figure 5 (ci-dessous) l’illustre.

- Ici, on observe que les offres C01 bleues (blocs parents) se concentrent en bas de l’axe y (presque toujours sous les 15 £/MW/h).
- Les offres C02 roses (blocs enfants), elles, se dispersent plus haut sur l’axe y, là où elles peuvent faire grimper le prix d’équilibre.
- À noter également la position de ces offres C02 sur l’axe x : la majorité sont de faible volume (5 MW ou moins), avec une forte concentration à 1 MW, le volume minimum autorisé.
Qui fixe les prix d’équilibre du Dynamic Containment ?
Tenter de fixer un prix d’équilibre élevé comporte le risque de ne pas être accepté du tout. L’option prudente consiste à enchérir à un prix bas, ce qui augmente les chances d’être retenu, mais vous soumet au prix fixé par d’autres. Si tout le monde jouait la sécurité, les revenus du DC seraient très faibles. Or, on sait qu’ils sont souvent très attractifs : certains acteurs prennent donc le risque.
Créer un « surplus » de revenus
Alors, quels acteurs tirent les prix d’équilibre vers le haut ? Pour le savoir, on peut calculer le « surplus » de revenus qu’ils créent pour d’autres actifs. Le « surplus » est ici défini comme la valeur supplémentaire au-dessus du prix auquel d’autres ont enchéri. Pour le calculer, on utilise le prix d’offre accepté le plus élevé de chaque participant lors de chaque enchère.
Qui sont les faiseurs de prix du Dynamic Containment ?
Maintenant que nous avons vu comment fonctionne le surplus, voyons quels participants l’apportent aux autres. La figure 6 (ci-dessous) classe les acteurs du marché selon le surplus de revenus qu’ils ont généré pour le reste du marché. Ce classement met en lumière les acteurs les plus susceptibles de fixer les prix d’équilibre dans le Dynamic Containment : ce sont les faiseurs de prix du DC.

- Près des deux tiers (65,6 %) du surplus proviennent des offres C02 (blocs enfants) — c’est-à-dire les offres à faible volume et prix élevé, situées sur la lame de la crosse de hockey.
- Pour confirmer la prépondérance de la stratégie « crosse de hockey » : sur les 100 plus gros surplus générés, seuls six proviennent d’offres supérieures à 1 MW.
- À noter la position d’Anesco à l’extrême gauche du graphique. Anesco exploite un actif de 1 MW. Comme la taille minimale d’offre en DC est de 1 MW, Anesco ne peut pas créer de bloc enfant à partir de ses ordres. Il n’a donc généralement pas intérêt à proposer des offres très basses, et préfère miser l’ensemble de sa capacité à des prix élevés. Cela explique en grande partie pourquoi il fixe souvent le prix d’équilibre — et génère ainsi du surplus pour les autres.
Qui profite le plus des faiseurs de prix ?
La figure 7 (ci-dessous) montre les gains potentiels issus des prix d’offre les plus élevés, exprimés en pourcentage des revenus des actifs, par participant. Imaginons que les enchères DC deviennent rétroactivement des enchères pay-as-bid (où chaque gagnant reçoit le prix proposé). La partie bleue de la barre représente les revenus d’un actif (si chaque actif était payé son prix d’offre le plus élevé — souvent son offre C02 — sur toute sa capacité ; ce n’est pas exactement ainsi que fonctionnent ces enchères, mais cela reste un point de comparaison pertinent). La partie verte représente les gains au-dessus du prix d’offre maximal — le « surplus ».

- Ce qui frappe dans ce graphique, c’est l’importance du surplus (en vert). Même si certains acteurs prennent plus de risques que d’autres, tout le monde dépend de ceux qui fixent le prix d’équilibre pour une grande partie de ses revenus.
- Cela dit, il existe de grandes disparités de stratégie : certains actifs dépendent à plus de 95 % du surplus généré par d’autres, tandis qu’à l’opposé, certains tirent moins de la moitié de leurs revenus du surplus grâce à leur stratégie plus risquée (et souvent gagnante).
Appétit pour le risque
Au final, dans une enchère au prix d’équilibre, tous les gagnants sont payés le même montant (£/MW/h). Ainsi, dans les enchères Dynamic Containment, ceux qui génèrent du surplus pour les autres (ou un « uplift » sur le prix d’équilibre) jouent un rôle clé. Mais ces faiseurs de prix prennent aussi le risque de ne pas être acceptés du tout. La figure 8 (ci-dessous) montre le taux d’acceptation par acteur. (Les participants sont classés de gauche à droite selon le surplus qu’ils ont généré pour les autres, comme vu à la figure 6.)

- Ce graphique montre le pourcentage de volume proposé lors des enchères DCL effectivement accepté.
- On pourrait s’attendre à ce que ce taux d’acceptation soit corrélé au surplus de la figure 7, avec un taux croissant de gauche à droite. Ce n’est pas le cas.
- Centrica et Limejump affichent un taux d’acceptation très élevé, mais génèrent peu de surplus pour les autres : ils adoptent une stratégie prudente et sont « preneurs de prix ».
- Anesco, SMS et Sembcorp connaissent plus de rejets, mais créent un surplus significatif pour les autres, grâce à leur stratégie d’offre plus risquée en tant que faiseurs de prix.
- Habitat, Tesla et Zenobe maintiennent un taux d’acceptation élevé (75-85 %) tout en générant un surplus important sur le marché DC.
Conclusion
Depuis les changements du Dynamic Containment le 1er avril 2022, plusieurs tendances de stratégies d’enchères sont apparues. Beaucoup adoptent l’approche « crosse de hockey », liant de gros volumes à bas prix à de petits volumes à prix élevé pour maximiser leurs chances d’être retenus.
Ces évolutions ont conduit certains acteurs à créer plus de valeur que d’autres. Ces faiseurs de prix tirent régulièrement les prix d’équilibre vers le haut, ce qui profite à tous. Mais cette stratégie comporte des risques : ces acteurs voient souvent plus de leurs offres rejetées que les preneurs de prix.
Il existe donc plusieurs approches pour enchérir dans le Dynamic Containment. Reste à voir si cette volatilité des prix d’équilibre perdurera à l’approche de l’été (alors que les besoins de l’ESO vont augmenter). Nous continuerons à vous tenir informés des tendances de ces prix d’équilibre sur l’ensemble de la gamme de services de réponse fréquence, au fur et à mesure de l’évolution des marchés et de l’arrivée de nouvelles données.



